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Mantes-la-Jolie : un ex-policier aux assises pour le viol d’une femme en cellule de dégrisement

Mantes-la-Jolie : un ex-policier aux assises pour le viol d’une femme en cellule de dégrisement

Aboubakry N’diaye – Publié le 27.10.2014, 23h30

Un ex-policier accusé d’avoir abusé d’une femme, ivre, en cellule de dégrisement, est jugé depuis ce lundi devant les assises des Yvelines.

L’air perdu, elle bredouille trois mots: «j’ai été violée». Mais devant la cour d’assises des Yvelines, l’ex-policier accusé d’avoir abusé de cette femme, ivre, en cellule de dégrisement, maintient sa version: «une relation sexuelle consentie».

En cette nuit du 16 au 17 mai 2012, elle lui avait semblé «alcoolisée». «Pas ivre, mais gaie», précise calmement cet homme de 40 ans, cheveux ras et chemise blanche, au premier jour de son procès ce lundi à Versailles.

Âgée alors de 44 ans, cette Espagnole d’origine marocaine, dépressive et au chômage, vient de noyer son mal-être dans une grande quantité de bière. Débraillée, elle vocifère en titubant. Ses proches appellent pompiers et police, qui la placent en cellule de dégrisement au commissariat de Mantes-la-Jolie.

Cette nuit-là, l’ex-brigadier est chargé de la garde des cellules. Elle demande un verre d’eau, il l’emmène aux toilettes. Elle lui prend alors la main pour la poser sur son sein, raconte-t-il: «J’ai pris ça pour un geste de séduction».

Elle fait un malaise, revient à elle. Suivent une fellation puis un rapport sexuel, sans préservatif. «C’est possible qu’à l’époque mon jugement ait été altéré», concède-t-il dans un léger sourire contrit, tout en assurant qu’elle avait semblé consentante.

«Provocante», «aguicheuse», avait-il dit aux enquêteurs, expliquant qu’il avait initié ce rapport pour faire souffrir sa maîtresse, une policière supposée infidèle. Il résume: «Je lui ai fait du mal involontairement, mais je n’ai pas violé cette femme».

Une brigade qui posait problème

Drapée dans un lourd gilet gris, visiblement éprouvée, elle lâche sa version: «Oui, j’ai été violée». Elle n’en dira pas plus à la barre.

Elle avait expliqué lors de l’instruction qu’à son arrivée au commissariat, un policier lui avait fait écrire son numéro de téléphone et «je t’aime» sur un bout de papier, à l’attention d’un collègue célibataire. Que le brigadier de garde l’avait ensuite violée en plaquant sa main sur sa bouche pour l’empêcher de crier, sans autres violences, ni menaces mais l’arme à la ceinture, ce qui l’avait effrayée.

De retour chez elle, elle avait fait une tentative de suicide et s’était confiée à l’hôpital. Son taux d’alcoolémie au moment des faits a été évalué entre 0,98 et 1,28 g/l de sang.

À la barre, les médecins décrivent une femme fragile qui «banalise» sa forte consommation d’alcool, dotée d’un «état intellectuel assez limité qui l’empêche de réfléchir à sa conduite» ce soir-là. Ses proches désapprouvent.

Une psychiatre qui l’a examinée en 2013 évoque des troubles hystériques puis «délirants, persécutifs», sans pouvoir dire s’ils existaient déjà avant la nuit du 16 mai.

Aujourd’hui, elle n’ose plus sortir seule, dort avec sa fille, est «dégoûtée» par la sexualité. Elle est désormais invalide à 80%, explique son mari. Lequel dépeint une vie de famille bouleversée: «C’est horrible».

Accusé de «viol commis par personne abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions», l’ancien policier, père de famille, risque 20 ans de réclusion. Sa hiérarchie a soumis sa révocation au ministre de l’Intérieur.

« Ça fait 886 jours que je regrette d’avoir eu cette relation sexuelle. J’ai une honte telle que je ne m’en suis pas encore remis», assure-t-il.

L’accusé avait appartenu à une brigade «qui me posait problème», dissoute avant les faits, relate à la barre le commissaire divisionnaire Frédéric Eloir, son ancien supérieur: «Il leur arrivait de jouer à +chat-bite+, à se toucher les seins ou les parties génitales pour se dire bonjour…»

Le commissaire décrit un homme «dépassé» au travail par une liaison avec une collègue, lui attribue un «appétit sexuel hors norme» pour des pratiques «violentes mais consenties»: «un sado-maso, à mon avis». Sourire incrédule, l’accusé secoue la tête.

Le verdict est attendu mercredi.

AFP